La réforme importante de la formation des enseignants en France, annoncée par le président Emmanuel Macron, qui prévoit la création des « écoles normales du XXIe siècle », implique un changement fondamental dans le parcours de formation des enseignants des premier et second degrés, avec la mise en place de concours de recrutement à bac + 3 dès 2025, alors que ces concours se situaient en fin de master (bac + 5) depuis 2022. Pour accompagner ce changement, les universités françaises sont invitées à ouvrir de nouvelles licences spécifiquement dédiées à la préparation au professorat des écoles, intégrant des disciplines telles que le français, les mathématiques, la géographie, et l'histoire. Cela implique, selon les mots du président Macron, la fermeture d'autres filières jugées moins porteuses d'emplois pour redéployer les ressources nécessaires à ces nouvelles licences.
Cependant, cette réforme suscite des inquiétudes et des critiques au sein du monde universitaire, notamment en ce qui concerne la faisabilité de fermer certaines filières pour en ouvrir d'autres, sans augmentation des ressources allouées. Dean Lewis, président de l'université de Bordeaux et vice-président de France Universités, soulève des préoccupations quant à l'identification des filières à fermer et la capacité de reconversion des enseignants de ces filières. La réforme, qui devrait être appliquée à la rentrée 2025, soulève aussi des questions sur le recrutement des étudiants pour ces nouvelles licences, la capacité des universités à augmenter leur offre de formation dans le contexte d'un budget constant, et l'impact sur le personnel enseignant et administratif déjà en sous-effectif.
En outre, cette réforme prévoit la transformation des Instituts Nationaux Supérieurs du Professorat et de l’Éducation (Inspé) en nouvelles « écoles normales », tout en promettant de conserver « le meilleur » de ces institutions. Cela a généré des interrogations sur le devenir des Inspé, leur statut futur, et la qualité de la formation qui y sera dispensée.
Nous soutenons l'idée d'avancer le concours de recrutement des professeurs à Bac + 3. Cette modification peut potentiellement ouvrir la voie à une dynamique de formation plus cohérente et plus alignée sur les besoins actuels de l'éducation. Toutefois, cette mesure doit s'accompagner de garanties fortes pour maintenir un haut niveau d'exigence académique et professionnel. Il est impératif que ce concours demeure rigoureux pour ne pas compromettre la qualité de l'enseignement, dans un contexte où les performances scolaires des élèves nécessitent déjà une attention accrue. De plus, les candidats réussissant ce concours à Bac + 3 devraient être tenus d'effectuer un stage de six mois en milieu scolaire, our ceux qui ne passeront pas par les masters professionnalisant évoqués par le gouvernement. Ce stage permettra une immersion professionnelle concrète, essentielle pour acquérir une expérience pratique et pour garantir une transition réussie vers le métier d'enseignant.
L'orientation vers la création de licences dédiées à la préparation au professorat des écoles est une initiative louable, visant à structurer le parcours de formation des futurs enseignants dès le premier cycle universitaire. Néanmoins, cette mesure doit être mise en œuvre avec discernement. Il est crucial d'identifier avec précision les filières existantes qui connaissent un faible taux d'insertion professionnelle avant d'envisager leur fermeture. Cette démarche nécessite une analyse fine et concertée avec les acteurs académiques pour s'assurer que les enseignants des filières concernées disposent de véritables perspectives de reconversion. Une approche équilibrée et respectueuse des ressources humaines et académiques est indispensable.
Considérant l'ampleur des changements proposés et les multiples répercussions sur le système universitaire et éducatif, nous préconisons d'adopter un calendrier de mise en œuvre plus étendu. Cette extension temporelle permettrait d'assurer une transition douce et équitable, favorisant une adaptation progressive de toutes les parties prenantes. Un dialogue constant avec les universités, les enseignants, les étudiants et les représentants des institutions de formation est essentiel pour recueillir les retours du terrain et ajuster la réforme en conséquence.
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