L'Europe se trouve confrontée depuis plusieurs années à un double défi existentiel. Le premier est externe et de nature essentiellement géopolitique. Le second est interne et de nature politique et sociale. La géopolitique conduit l'Europe à s'unir toujours davantage. La politique rend cette évolution plus difficile que jamais.
Objectifs climatiques non tenus parce qu’efforts insuffisants (cf. bilan 2024 de l’AEE), désaccords idéologiques importants à l’instar du Mercosur, sécurité intérieure, souverainetés nationales, envoi de troupes en Ukraine… Tant de défis majeurs qui divisent les 27 États membres, qui dans le même temps peuvent se vanter de réelles certitudes communes, par l’essence créatrice de l’Union Européenne et ses accords historiques.
L'interprétation de l'utilité de l'Union européenne reste donc ambivalente. Dès lors, la question se pose : faut-il encore croire en l'Union européenne ?
Candidat Renew Europe aux Élections européennes 2024 - Adjoint au maire de Reims, délégué aux Relations internationales
"Nous devons continuer de croire en l’Union européenne."
L’espace politique européen dans son ensemble est en crise. Il est en proie à des menaces tant extérieures, dont la guerre enUkraine est l’exemple le plus saillant, qu’intérieures, par une montée en puissance des forces populistes. Lesquelles sont, au passage, intrinsèquement opposées au projet européen parce que libéral au sens politique du terme. Les menaces extérieures à l’Europe, telle que la Russie ou les États-Unis trumpistes notamment, sont d'ailleurs des alliés objectifs de ces populismes européens.
Mais c'est précisément parce que ce contexte est particulièrement insécure qu'il faut, tout en reconnaissant sa — grande — perfectibilité, continuer de croire en l’Union européenne, parce qu’elle apporte des réponses systémiques à ces deux menaces.
Premièrement, les populismes nationaux restent, malgré une montée en puissance lors des dernières élections du Parlement européen, globalement marginalisés dans les institutions européennes. Et ceci, parce que droite et gauche pro-Europe, qui restent majoritaires, savent monter des coalitions de circonstance. Elles savent ainsi user d'un compromis que nos institutions françaises envieraient, et qui permet de“corneriser” les europhobes dans le processus décisionnel. Aussi, reconnaissons-le, les populistes sont globalement médiocres, voire absentéistes, comme Jordan Bardella malgré son rôle de président de groupe auParlement européen, limitant ainsi grandement leur influence de facto.
Deuxièmement, les crises internationales de ces dernières années ont laissé apparaître que l'échelon européen constituait un niveau pertinent de décision et d’action publiques. Seuls, les États sont relativement peu puissants pour répondre à des défis transnationaux qui, par définition, ignorent les frontières nationales.Les défis climatiques, les crises sanitaires et leurs conséquences sociales et économiques, les guerres aux portes de l’Europe sont autant de défis qui ont amené l’Union européenne à se saisir, à la demande de ses États membres, de compétences qui étaient inimaginables au moment de sa création. Le débat, qui est certes un serpent de mer depuis 70 ans, autour d'une armée européenne dans le contexte du retournement stratégique américain en est une preuve.
Étymologiquement, le mot “crise” signifie aussi “opportunité”. Gageons alors que de nombreuses opportunités sont encore appelées à se dessiner dans les années à venir pour le projet européen…
Docteur en Droit public et professeur
"Nous ne pouvons plus croire en la forme actuelle de l’Union Européenne."
Récemment, la Commission européenne a dévoilé sa vision du monde agricole de demain. Entre dérèglement climatique et une économie en berne avec la montée du populisme, l’UE arrive à un point de bascule. Pour comprendre pourquoi l’UE ne peut plus exister sous cette doxa technocrate, il faut revenir aux balbutiements de la construction européenne.
Réfléchie par les pères de l’Europe comme Robert Schuman, la construction européenne était un moyen d’éviter un troisième conflit mondial entre l’Allemagne et la France, sur deux territoires qu’ils se disputaient, à savoir la Sarre et la Ruhr.
Il a été mis en place une résolution de leurs différends par le haut, à la manière des Liaisons dangereuses de Madame de Merteuil. C’est ainsi que le traité CECA voit le jour en 1950 et marque le début de cette construction européenne.
Oscillant entre fédéralisme et confédération, l’UE est une association d’États. On parle de statut sui generis, et elle ne peut fonctionner qu’à travers trois principes fondamentaux : attribution, subsidiarité et proportionnalité.
Ce qui s’est passé au fil des années, c’est l’installation de la bureaucratie au niveau de l’UE, avec une forme d’opacité entre le droit primaire et le droit dérivé.
De plus, entre la Commission européenne qui n’est pas élue, la fonction de présidence tournante de six mois et la présidence stable de deux ans et demi, mise en place en 2011 après la crise économique, dont le premier président fut Herman Van Rompuy, l’UE s’est calquée sur le millefeuille administratif français, ce qui rend son action inaudible.
L’UE est incapable de fonctionner de manière homogène entre les pays fondateurs et les derniers entrants, à travers le mécanisme de l’acquis communautaire.
Aujourd’hui, l’UE doit assumer ses choix : tendre vers un fédéralisme à l’américaine au lieu d’être dans une forme de déni qui, en même temps, oblige les États membres à transférer des compétences de plus en plus larges à l’UE au nom d’une souveraineté européenne qui n’existerait que si l’UE avait les caractéristiques juridiques d’un État.
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