Pour donner suite à l’annonce de Gabriel Attal sur la nécessité d'une nouvelle réforme de l’assurance-chômage visant à la restriction du temps d’allocation, nous ne pouvons rester silencieux. Notre désaccord est total, bien qu’une baisse sur le long terme puisse être engagée dans un futur proche, les conditions ne sont aujourd'hui pas réunies à cet effet.
Cette réforme apparaît dans une quasi seule démarche de restriction budgétaire avec un déficit plus conséquent qu’annoncé et non une profonde nécessité. Les économies attendues avec une réduction des dépenses en assurance-chômage sont de l’ordre de 3 milliards d’euros, alors que les deux précédentes réformes permettront déjà d’économiser 6,7 milliards par an à l’horizon 2027. Le gouvernement se repose sur le rapport de la Dares et la DGEFP pour venir à cette conclusion : réduire -une fois de plus- la durée des droits renforcerait les excédents du régime de l’assurance-chômage et serait donc compatible avec la trajectoire financière inscrite dans le document de cadrage sur lequel les partenaires sociaux ont statué dernièrement.
La conjoncture incertaine du marché du travail n’appelle pas un durcissement immédiat des conditions d’indemnisation. Toutes les enquêtes de conjoncture, sur lesquelles nous nous basons, estimaient une stagnation du taux de chômage en 2023 suivie d’une augmentation à l’horizon 2024-2025. Il paraît dès lors complexe de justifier un tel durcissement dans un contexte de chômage stagnant ou en légère hausse. On notera également l’incohérence avec les politiques de formation menées et des résultats à peine visibles tant le laps de temps est court. Le marché du travail n’est pas encore prêt, forcer les allocataires à accepter du travail en incohérence avec le profil, sous prétexte d'activité, notamment dans les secteurs en tension, n'entrainera aucun épanouissement. S’en prendre aux chômeurs, qui touchent une allocation émanant d’un droit acquis par le travail, est une erreur, un déni de réalité.
Nous pointons aussi les risques juridiques d’un nouvel abaissement de la durée des droits, au-delà de la dimension sociale. Le Conseil d’État a été saisi par les syndicats sur la précédente réforme, entrée en vigueur en février 2023 et ayant déjà réduit de 25% la durée d’indemnisation. La décision sur le fond n’a pas encore été rendue. Une réforme dont nous n’avons pas encore connu les résultats. Une réforme censée basée sur l’idée d’une modulation des allocations-chômage selon la conjoncture économique en adaptant les droits au contexte économique. On observe à ce jour un nombre de chômeurs en hausse et un gouvernement qui n’assouplit pas les règles et au contraire, veut les durcir.
Le gouvernement mène une politique aux antipodes de la réalité, déconsidérant la dimension humaine et pragmatique, dans l'unique dessein de réduire l'impact de leurs erreurs, incarnées par le déficit croissant.
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